Comment se conclue un traité?

L’art. 38 du Statut de la Cour Internationale de justice dispose que la Cour applique notamment:
« les conventions internationales, soit générales, soit spéciales, établissant des règles expressément reconnues par les États en litige ».
Les traités internationaux bilatéraux (entre deux États) ou multilatéraux (auxquels plusieurs États sont parties) constituent une source essentielle du droit international.

La Convention de Vienne (CV) sur le droit des traités signée le 23 mai 1969 a codifié le droit coutumier relatif aux traités. Oeuvre de la Commission du droit international, la convention, au-delà de la codification, contient des dispositions de droit nouveau participant ainsi au développement progressif du droit international. Elle est entrée en vigueur le 27 janvier 1980, après le dépôt du 35e instrument de ratification (CV, art.84). Cette entrée en vigueur tardive reflète les oppositions de certains États aux dispositions de droit nouveau contenues dans la convention. D’ailleurs, la France n’est pas partie à la Convention, en raison de sa réticence vis-à-vis des dispositions relatives au jus cogne. Toutefois, la France est liée par les règles coutumières qu’elle a acceptées et qui sont codifiées dans la CV, car même codifiées, elles subsistent en tant que coutume.
La CV a valeur supplétive, c’est-à-dire qu’elle s’applique en cas de silence du traité. Autrement dit, les parties à un traité peuvent décider entre elles d’adopter d’autres modalités de conclusion, de vie ou de fin de leur traité, que celles prévues par la CV.
Ce texte est complété par la CV du 21 mars 1986 sur le droit des traités entre États et organisations internationales ou entre organisations internationales.

Définition des traités (CV, art. 2§1):
Les traités sont des accords conclus par écrit. La CV n’exclut pas que des traités puissent avoir une forme orale (accords verbaux, CV, art.3), mais les règles de la CV ne les concernent pas.
Il n’y a pas de différence entre les traités, selon leur dénomination. Les termes sont variés: traité, convention, protocole, accord, pacte, charte… Si la pratique réserve souvent certaines dénominations à certains traités (ex. Protocole, utilisé pour désigner un traité qui complète un autre traité), les règles applicables sont les mêmes.
Un traité peut se présenter sous différents aspects. Un texte seul au bas duquel toutes les parties apposent leur signature, par exemple. Mais il peut aussi être constitué de plusieurs documents, c’est un échange de lettres ou de notes entre personnes ayant le pouvoir de représenter l’État. Dans ce cas, malgré la pluralité de documents, il s’agit bien d’un seul traité.
Le traité est l’expression de volontés concordantes afin de réaliser un but ou un objet commun. En droit international, les parties sont sur un pied d’égalité et libres d’accepter l’engagement qui procède du traité.

Pour ce qui est de la procédure de conclusion d'un traité, il faut distinguer deux grandes étapes. Une première phase conduit à l’adoption du texte, la seconde aboutit à l’engagement de l’État.

L’adoption du texte:
La première étape débute par la négociation entre les États représentés par des plénipotentiaires, c’est-à-dire des personnes munies de pleins pouvoirs, habilitées à adopter le texte pour le compte de leur État et même dans certains cas à l’engager.
Lorsque le traité ne réunit qu’un nombre restreint de parties, l’adoption du texte à l’issue de la négociation se fait par accord unanime des représentants. En revanche, si le traité a vocation à accueillir un grand nombre de parties, il est fréquent que l’adoption ait lieu lors d’une conférence internationale réunie à cet effet ou au sein d’une OI. Dans ces conditions, le texte peut être adopté à la majorité.
À ce stade, les États ayant participé à la négociation n’ont aucune obligation. Le texte adopté comporte en général plusieurs articles parfois précédés d’un préambule et suivis d’annexes. Parmi les articles du texte, on distingue les dispositions relatives à la matière même du traité et les dispositions qui concernent la vie du traité (modalités d’entrée en vigueur, adhésion de nouvelles parties, possibilité d’émettre des réserves…) qui, placées à la fin du texte, sont appelées clauses finales.
La phase de négociation se clôt par une authentification du texte. Les États reconnaissent le texte adopté comme l’aboutissement de leur négociation. Elle se manifeste par le paraphe ou la signature. Les États ont pour seule obligation celle qui résulte de l’application du principe de bonne foi en droit international, de ne pas remettre en cause le but et l’objet du traité avant son entrée en vigueur (CV, art. 18).
La date d’un traité est celle de la signature.

L’engagement de l’État est l’expression du consentement de l’État à être lié par le traité. Cet engagement doit être exprimé formellement, la forme d’expression étant précisée dans les clauses finales du traité. L’État devient alors contractant (quand le traité n’est pas encore internationalement en vigueur) ou État partie (si internationalement en vigueur).

L’engagement peut se manifester selon deux types de procédures.
Procédure courte: l’engagement de l’État se fait par la seule signature. La phase d’authentification et d’engagement sont confondues. On parle aussi d’accord en forme simplifiée. Les clauses finales prévoient cette procédure qui concerne diverses sortes de traités. Ces accords sont conclus au nom des gouvernements. Le ministre des Affaires étrangères délivre les pouvoirs de signature (la signature de l'accord peut alors être effectuée par un autre ministre, un ambassadeur ou le chef de délégation), et signe les instruments d'approbation de ces accords.
Procédure longue: l’engagement de l’État résulte d’une formalité particulière. La signature ne vaut qu’authentification du texte, l’État devant en plus manifester sa volonté d’être lié par le traité. Il s’agit d’accords en forme solennelle
Ces accords, désignés à l'article 52 de la Constitution de 1958 par le terme "traités", sont conclus au nom des chefs d'Etats. Pour la partie française, ils sont signés soit par le Président de la République, soit le plus souvent, en son nom. Ils sont toujours ratifiés par le Président de la République.
Ainsi la ratification du traité émane du Chef de l’État. En France, le Président de la République négocie et ratifie les traités (C°, art.52). Dans de nombreux pays, la ratification par le chef de l’État est soumise dans certains cas à une autorisation parlementaire, faisant intervenir le Parlement dans la procédure d’engagement de l’État. Ex. Ainsi, le refus du Congrès américain d’autoriser la ratification du traité de Versailles empêcha les USA de devenir membre de la Société des Nations ou le rejet par l’Assemblée Nationale française du traité créant la Communauté européenne de défense en 1954 fit échouer le projet.
En France, l’art. 53 de la Constitution énumère les traités pour lesquels l’intervention du Parlement est nécessaire: ces traités ne peuvent être ratifiés ou approuvés qu’en vertu d’une loi (loi d’habilitation). Par ailleurs, le Président peut consulter le peuple pour lui demander l’autorisation de ratifier un traité (loi référendaire).
Il existe des procédures voisines qui supposent toutes l’accomplissement d’une formalité ultérieure à la signature pour engager l’État: ce sont l’approbation (par le Gouvernement en France) ou l’acceptation.
Enfin, les États qui ont participé à la négociation désignent un dépositaire qui peut être un ou plusieurs États, une OI ou le principal fonctionnaire d’une OI qui va garder le texte original, recevoir les signatures, les ratifications, en informer les autres parties… (CV, art.77).
Le traité peut prévoir certaines conditions à son entrée en vigueur internationale. Ce peut être un nombre minimum de ratifications comme pour la CV, ou en plus la ratification par certaines catégories d’États (ex. Protocole de Kyoto de 1997).


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