L'oeuvre titanique de ma thèse en quelques lignes



Je souhaite partager avec vous un extrait de mon livre, tiré de ma thèse de doctorat en droit international, sur le rôle du juge international dans l'application de ce droit souvent flou et lacunaire de par la volonté des États, le fameux principe du consensualisme.
Il est en effet souvent difficile de comprendre le mécanisme du droit international et son ordonnancement juridictionnel. J'ai travaillé six ans pour comprendre et débrouiller ces noeuds. Le travail a été bien rude, comme imaginable, et cela, pour plusieurs raisons.

D'une part, on accuse le droit international d'être souvent "lacunaire". Il est certes vrai qu'il s'agit d'un ordre juridique non parfait, à la différence des ordres internes. Mais la raison est évidente. En droit international, il n'y a pas de législateur et tout, vraiment tout, dépend de la volonté des États qui en ont été jusqu'à il y a très peu, les seuls sujets. Ce facteur en dit tout. Et tant que ce volontarisme des États ne sera pas compris, il sera réellement difficile aussi de comprendre l'esprit que anime cet ordonnancement juridique.

D'autre part, un doctorat est toujours un parcours du combattant. Ceux qui l'ont vécu, savent de quoi je parle... Il est extrêmement difficile de se réveiller le matin, sans savoir par où commencer, comment se débrouiller dans un univers infini d'informations, actualisations, de sources... Quitte à devoir sembler maniques, il est indispensable de s'organiser, minute par minute... Le risque en est, en effet, de s'y perdre et, par là, de voir le temps passer sans rien conclure...

Personnellement, travaillant comme enseignant-chercheur en même temps, et ayant un enfant en bas âge pendant ces six années, j'ai rencontré de grandes difficultés et de nombreuses chutes d'humeur et de motivation. Je n'ai jamais abandonnée, mais je n'ai jamais été capable de lâcher prise non plus au prix d'un effort mental qui m'a valu beaucoup de cheveux blancs avant le temps...

Il est très ardu de décrire l'expérience, il faut la vivre pour la croire... Mais à aujourd'hui, même si je ne suis pas sûre que je serais encore capable d'effectuer ce travail immense de 600 pages, je ne le regrette bien évidemment pas et je suis fortement reconnaissante avant tout à moi même. Oui, à moi même. Et non pour être égoïste, car cela ne s'adapte vraiment pas à ma nature et à mon caractère. Mais parce que les doctorants prennent tout sur eux mêmes. Il est donc essentiel, à mon sens, de pouvoir avoir des doutes, des bas, voire même des très bas... mais à condition de retrouver en soi, et seulement en soi, la force de recommencer et ne jamais abandonner. Le prix final est immense et vaut tous les efforts accomplis: la satisfaction d'une oeuvre titanique qui a été accomplie par nous et seulement par nous-mêmes.

Après, tous les autres.... qui ont certes leur importance pour le soutien donné.

À la fin de mon doctorat, une fois que la thèse avait été soutenue, je suis restée plusieurs mois dans l'incertitude. Me réveiller le matin et ne plus devoir penser à mon travail quotidien de recherche, rédaction, ajustement... Cela faisait très bizarre... Il a fallu plusieurs mois pour m'adapter, pour recommencer.

C'est ainsi que quelques mois après, j'ai décidé de transformer ma thèse, d'en choisir une partie qu'à mon sens était assez emblématique et surtout qui pouvait être un point central pour la compréhension de cette matière, le droit international, qui, depuis toujours, me charme. J'ai ainsi réouvert mon travail et donné naissance au livre que je vous présente ici, avec ce morceau choisi, assez emblématique:

" Le droit international, loin d’être un corps de règles figé, est un processus en constant mouvement qui permet l’adaptation des normes à l’évolution des relations internationales. Le rôle du juge doit alors tenir compte de cette évidence. 
En effet, la Cour « est nécessairement confrontée, lorsqu’elle applique et interprète le droit, à un environnement politique et juridique évolutif qu’elle doit prendre en compte ». Dans une société décentralisée comme la société internationale, « l’interprétation n’apparaît souvent guère comme l’exercice d’une fonction constitutionnelle. C’est dire qu’elle n’est pas nécessairement facteur de droit ; qu’elle n’est pas nécessairement une fonction centrée sur l’application des normes selon les préceptes de l’art juridique ».
Si, en effet, le juge international est toujours un juge, comme en droit interne, l’absence de législateur international et la nécessaire acceptation de la juridiction de la Cour, modifient sensiblement sa fonction. « Le particularisme de l’ordre juridique international nous oblige en effet à appréhender tout le domaine du règlement des différends à travers le prisme du sacro-saint principe de la souveraineté de l’Etat, et donc de ne jamais perdre de vue l’importance du consentement de l’Etat ». Le juge sait pertinemment que les Etats porteront un jugement de valeur sur ses propres jugements et que sa propre fonction et son futur en dépendront. 
Le droit international « reste à l’état fluide et demeure réfractaire à une pénétration de techniques juridiques le poussant vers la régularité de la règle. Il reste fortement fluctuant, marqué du fer rouge par les facteurs et les contingences politiques ». 
C’est ici toute l’originalité de la fonction judiciaire internationale qui se tourne inévitablement vers le monde du non-droit, mais également de la nécessité d’opérer des choix entre des conceptions différentes de juger".

Je ne sais pas si je le ferais à nouveau, mais aujourd'hui je suis follement amoureuse de ma thèse, et je ne la changerais en rien...

Si ces questions vous intéressent, si le droit international vous passionne et si vous voulez comprendre son fonctionnement, ce livre vous aidera à vous débrouiller dans l'infini de l'ordre juridique international.

Vous le trouverez en format kindle sur https://www.amazon.com/Entre-droit-dans-jurisprudence-internationale-ebook/dp/B01M0PVJX2/ref=sr_1_1?ie=UTF8&qid=1517918030&sr=8-1&keywords=federica+nicolo

ou en format ePub sur http://www.nicoloeditions.com/a-la-une/livres/droit/entre-droit-et-non-droit-dans-la-jurisprudence-internationale

au prix de 8€50.


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